Il y a 75 ans, le 1er septembre 1940 et dans les jours qui suivirent, les corps de 18 marins français ont été retrouvés sur la plage d'Életot. Ils provenaient du Meknès, paquebot torpillé le 24 juillet par une vedette allemande. Il embarquait 1300 militaires qui rentraient chez eux. Le naufrage cause la mort de 420 personnes, dont les corps sont retrouvés plus d’un mois plus tard au pied des falaises des côtes normandes et anglaises.

Ils ont été enterrés provisoirement dans un cimetière maritime créé à la Valleuse, entre le Corps de Garde et la grue. La première tombe est créée le 23 juin 1940 pour enterrer un soldat anglais non identifié.

Voici leurs noms avec leur département d’origine, ainsi que le plan du cimetière maritime :

  • Maurice BAUDRY (75)
  • Roger BÉZARD (45)
  • Eugène CONDETTE (62)
  • Pierre GUÉRIN (16)
  • Fernand GUILLOU (76)
  • Marcel HAUYÉ (44)
  • Célestin LE FRANC (56)
  • Maurice LIREUX (14)
  • Isidore LOUIS (18)
  • Albert NANDILLON (36)
  • Henri OLLIVIER (22)
  • Jean VAILLANT (75)
  • Ainsi que 6 autres français inconnus.

Plan du cimetière maritime

 

 Le 12 septembre, on retrouve le corps d'un aviateur anglais du 601st Squadron de la Royal Auxiliary Air Force : le Pilot Officer Julian Langley SMITHERS. Son avion a été abattu le 11 août 1940 au-dessus de la Manche, lors de la Bataille d’Angleterre opposant la Royal Air Force à la Luftwaffe. Il est également enterré au cimetière maritime.

Les premières exhumations ont lieu le 11 août 1948 avec les corps d’Albert NANDILLON, Jean VAILLANT et Eugène CONDETTE, qui vont rejoindre leurs communes d’origine respectives. Une deuxième série d’exhumation a lieu le 17 septembre 1949 avec les corps de Fernand GUILLOU, qui sera inhumé au cimetière de Graville au Havre, et de Maurice LIREUX, qui sera inhumé à Eraines, dans le Calvados. Suivent en 1950 les corps d’Isidore LOUIS et de Célestin LE FRANC. Les autres corps ont été transférés dans d’autres cimetières, principalement au carré militaire de Saint-Valéry-en-Caux.

 

Les Oubliés du Meknès : 70 ans de chape de plomb sur une tragédie politiquement délicate.

Les faits : 1 mois et 2 jours après la signature de l'armistice franco-allemand, un jeune officier « voyou », obnubilé par la chasse au tonnage coulé, aux commandes d'une vedette rapide allemande mitraille et torpille un bateau français, parfaitement identifié comme tel, provoquant la disparition de 420 marins dont de nombreux militaires démobilisés.

Le gouvernement Pétain, dans sa position de vaincu, s'en plaindra mollement auprès des autorités allemandes et taira les circonstances de l'affaire à la presse et au public. Les autorités allemandes rétorquent que le mois accordé aux navires français pour rallier la France était expiré depuis le 22 juillet et que le torpillage du bateau avait eu lieu le 24 juillet ; il convient de noter que cette circulaire avait été transmise tardivement par l'amirauté au Meknès, le 24 pour effet le 22.

À la libération, face à la multitude de faits d'armes, d’exactions et de crimes révélés, la disparition de 420 marins ralliant la France de Vichy et fuyant ce qui allait devenir la France Libre du général de Gaulle (au faîte de sa gloire en 1945), risquait de trouver peu d'empathie dans les médias et l'opinion publique : de nouveau, le « couvercle » est mis sur ce drame.

Ce n'est que par la détermination des associations, des rescapés et descendants des marins qu'en 2009, le tribunal administratif de Rennes rend un jugement reconnaissant la qualification du torpillage du Meknès en crime de guerre, 70 ans après, et qu'enfin une stèle soit érigée à leur mémoire, entre Berneval-le-Grand et Saint-Martin-en-Campagne. 

Stèle des Oubliés du Meknès, d'après http://www.lesoubliesdumeknes.fr

 

IDJ APLINLe soldat anglais enterré au cimetière, dont nous fleurissons la tombe à chaque commémoration, provient lui d’un autre naufrage, celui du Derrycunihy, cargo qui a explosé sur une mine acoustique allemande le 24 juin 1944 au large de Ouistreham, faisant 214 morts et 150 blessés. Son corps est retrouvé sur la plage le 6 septembre 1944, apporté par les courants.

Il s’agit du trooper Ivor Douglas James APLIN, du 43rd Reconnaissance Regiment.

Depuis le 20 juin, le Derrycunihy était au mouillage au large de Ouistreham, avec à son bord les 500 hommes de ce régiment. Au matin du 24 juin, le navire appareille pour gagner un endroit moins encombré, mais à peine les machines ont-elles été mises en route, qu'une énorme explosion retentit, le navire, touché par une mine à dépression, est coupé en deux, et sa poupe s'enfonça en quelques secondes dans les flots, engloutissant des dizaines d'hommes pris au piège, d'autant plus qu'une partie des véhicules amarrés sur le pont s'est écroulée sur eux.

Le régiment est en grande partie anéanti, avant même les combats qui commencerons le lendemain avec la bataille de l'Odon, près de Caen.